Il n’est pas rare que les établissements de crédit, lorsque la responsabilité des associés et actionnaires est limitée par la forme de la société (sociétés à responsabilité limitée, sociétés par actions simplifiées ou sociétés anonymes), exigent la caution du dirigeant dans le cadre de tout financement qui pourrait être accordé à la société. C’est une manière efficace de contourner la limitation de la responsabilité des associés et actionnaires dont fait partie le chef d’entreprise dans l’immense majorité des entreprises françaises.
La jurisprudence veille au grain afin d’éviter qu’une telle pratique ne finisse par être abusive… Petit tour de piste ?
L’article L.341-2 du Code de la consommation dispose : « Toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : « En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de … couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n’y satisfait pas lui-même. ».
Il ressort donc de la lettre même de cet article qu’à peine de nullité, l’engagement manuscrit émanant de la caution doit précéder sa signature. Cette interprétation a en outre été confirmée par une jurisprudence constante et notamment un arrêt récent de la Cour de cassation (Cass. com., 17 sept. 2013, n°12-13.577). En conséquence, si la signature de la caution précède la mention manuscrite, l’acte de cautionnement ne démontre donc pas que la caution s’est engagée sur les termes de cette mention. Signature puis mention manuscrite, nullité assurée ! Mention manuscrite puis signature, la caution est bel et bien engagée !
Fort de cette jurisprudence bien établie, une caution a voulu aller au-delà de l’esprit de ce texte. En l’espèce, la caution, par inadvertance, avait oublié quelques mots dans la sacro-sainte formule de la mention manuscrite. La formule légale avait été tronquée du terme « intérêts » et la caution a tenté d’obtenir la nullité de son engagement. La cour d’appel de Dijon a fait droit à sa demande en considérant que l’absence de cette mention introduisait une contradiction dans l’acte de caution et une ambiguïté dans l’étendue de l’engagement de la caution (CA Dijon, 27 juin 2013). La Cour de cassation a considéré que l’omission du terme « intérêts » n’avait pour conséquence que de limiter l’étendue du cautionnement au principal de la dette. La validité du cautionnement ne pouvait pas être affectée par cet oubli (Cass. com., 4 nov. 2014, n°13-24.706) !
Cette solution doit être approuvée ! Il est essentiel que la caution prenne conscience de l’ampleur de son engagement. C’est pour cela qu’elle doit d’abord écrire la mention requise par la loi puis ensuite apposer sa signature. La preuve est ainsi faite qu’elle ne s’est pas engagée à la légère. Mais un oubli dans la formule ne signifie pas qu’elle n’a pas pris conscience de la portée de son engagement. Au pire, cela pourrait signifier que son attention a été détournée pendant qu’elle s’appliquait à retranscrire une mention manuscrite, qui, il faut bien l’avouer, n’a rien de bien passionnant…
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4 commentaires
willot jean marie
je souhaite savoir si le remboursement d’une caution donne lieu à déclaration de pertes lors de la déclaration d’impôts ?
Merci.
Sébastien Robineau
Bonjour,
Tout dépend de votre statut fiscal : BIC ou TS ?
Bien à vous,
Sébastien Robineau
Avocat associé
willot jean marie
j’ai arrêté l’entreprise en décembre 2013, la BNP me réclame le règlement via ma caution (SAS, PDG), donc j’ai démarré le paiement.
(avec échelonnement et intérêt…), puis-je lors de ma déclaration IR sur revenu 2014 déclaré cette perte via un formulaire
Sébastien Robineau
Malheureusement, pas à ma connaissance…